Transformer notre centre de traumatologie pour combattre la COVID-19
Depuis le 3 avril dernier, l’Hôpital général de Montréal fait partie des centres accueillant des patients atteints de la COVID-19. Malgré cette nouvelle vocation, l’HGM doit maintenir les activités régulières de son centre de traumatologie, l’un des trois seuls centres de la province à détenir l’expertise nécessaire pour traiter les adultes victimes de traumatismes physiques graves.
La pandémie de COVID-19 transforme l’aspect – et les processus de traitement – du Centre de traumatologie Dr David S. Mulder de l’Hôpital général de Montréal. « Nous accueillons souvent plusieurs victimes à la fois au centre de traumatologie », explique le Dr Kosar Khwaja, chirurgien traumatologue et intensiviste au Centre universitaire de santé McGill (CUSM). « Maintenant, avec la pandémie de COVID-19, nous essayons d’isoler chaque patient afin de réduire le plus possible les risques d’infection. » Si plus d’un patient nécessite des soins au poste de traumatologie, il faut soit ralentir les soins et ne traiter qu’un seul patient à la fois, soit prendre le risque qu’un patient en infecte un autre; de plus, la désinfection de la salle après le départ d’un patient peut prendre jusqu’à 30 minutes.
En somme, empêcher le virus de la COVID-19 d’infecter quiconque au poste de traumatologie demandait beaucoup de temps et d’espace.
Le Dr Khwaja a donc proposé une solution à la fois simple et innovante : l’érection d’une tente de réanimation entièrement équipée dans l’aire de stationnement, directement à l’extérieur du poste de traumatologie, afin de traiter plus d’un patient en isolement.

Inaugurée le mercredi 15 avril, la tente a immédiatement prouvé son utilité. « Elle nous a donné plus d’espace pour travailler dans le service des urgences, dont elle est essentiellement une annexe, dit-il. C’est une nouvelle salle entièrement fonctionnelle où nous pouvons réanimer tout patient qui nous arrive dans un état critique. Elle a été reçue favorablement par l’équipe d’urgence et le groupe de chirurgie traumatologique. Et nous pouvons l’utiliser non seulement pour les patients en traumatologie, mais aussi pour tout patient gravement malade. » Bien qu’elle soit actuellement organisée pour n’accueillir qu’un seul patient, la tente a été conçue de manière à pouvoir en accueillir jusqu’à trois si nécessaire.
Étonnamment, tout le processus de mise en place de l’installation – de la proposition à l’accueil des patients – a pris moins d’une semaine. « Tout le monde a apporté son soutien, de l’administration jusqu’aux personnes travaillant en première ligne, indique le Dr Khwaja. Dans les 48 heures suivant la rédaction d’une proposition, nous avions reçu une réponse positive de l’administration. Tout le monde s’est rapidement mobilisé autour du projet, et nous avons monté la tente en un temps record. » On a consulté des chirurgiens traumatologues, des anesthésistes ainsi que des médecins et des infirmières des services d’urgence pour s’assurer que l’équipement approprié était en place et que le flux des patients était optimisé. L’équipe a bénéficié de l’apport de spécialistes de la lutte contre les infections et de la biomédecine.
En trois jours seulement, l’équipe des services techniques a construit la structure et l’a dotée notamment de chauffage pour résister au froid du printemps montréalais et d’un système de ventilation pour assurer une circulation d’air saine, tandis que l’équipe multimédia a installé des caméras.
Avant l’ouverture de la tente de réanimation, l’équipe a effectué plusieurs simulations en vue d’assurer la sécurité des patients et celle du personnel soignant. « Tout le monde a mis les bouchées doubles pour réaliser ce projet. C’était un effort de collaboration, chacun effectuant ses tâches de manière très efficace. »
Cette mise en place rapide peut être attribuée, au moins en partie, à l’expérience approfondie dont dispose l’Hôpital général de Montréal. Le Dr Khwaja a travaillé auprès du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et de la Croix-Rouge canadienne dans des installations similaires partout dans le monde, et dirigé, pour le compte de l’Agence de la santé publique du Canada, la préparation en cas de catastrophes aux Jeux olympiques d’hiver de 2010 à Whistler, en Colombie-Britannique. Plusieurs autres membres de l’équipe de traumatologie participant au programme de chirurgie mondiale du CUSM ont également travaillé auprès d’organisations internationales dans des hôpitaux de campagne. « Nous avons la chance de pouvoir bénéficier de l’expertise que nous avons ici même à l’hôpital », se réjouit le Dr Khwaja.
La tente de réanimation de l’Hôpital général de Montréal a attiré l’attention de l’Hôpital de Lachine, qui s’en est inspiré pour installer ses propres tentes de soins d’urgence.
Le profil des patients admis en traumatologie a quelque peu changé en raison du confinement imposé par la pandémie de la COVID-19. « Avec moins de voitures sur les routes, il y a moins de victimes d’accidents de voiture, souligne le Dr Khwaja, mais les gens continuent de tomber et de se blesser chez eux. À un moment donné, les gens commenceront à retourner au travail et à l’école, et nous verrons davantage les types de traumatismes que nous recevons habituellement à cette période de l’année, comme les accidents de voiture et de motocyclette et les blessures liées au vélo. Or, la COVID-19 persistera au-delà de la première vague de la pandémie, et nous devrons maintenir les mesures de précaution contre l’infection. Notre tente de réanimation nous aidera donc à traiter les patients non seulement pendant les deux prochaines semaines, mais aussi tout au long des mois à venir. »