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Postpartum : la dépression et l’anxiété périnatale, parlons-en


Selon le rapport Bauer, 20 % des femmes souffriront de dépression ou d’anxiété périnatale. Une femme sur cinq, c’est énorme! Pourtant, on en parle encore très peu sur la place publique, dans nos familles et dans nos cercles d’amis.

Bien que l’on soit généralement plus familiers avec le mot postpartum (parlant de la période après l’accouchement), la maladie peut aussi débuter pendant la grossesse, c’est pourquoi j’utilise plutôt le mot « périnatal ».

Mother and father taking care of their baby
Dre Vi Nguyen, Psychiatre et maman

Je m’appelle Vi, mais à l’Hôpital général de Montréal et au Centre universitaire de santé McGill (CUSM) où je travaille, plusieurs me connaissent sous le nom de Dre Nguyen. Je suis psychiatre au sein de la Mission en santé mentale du CUSM et je me spécialise depuis une dizaine d’années dans le diagnostic et l’accompagnement des femmes souffrant de dépression et d’anxiété périnatale.

Je comprends ces maladies plus que bien des gens, j’en connais tous les signes et symptômes et je connais les saines habitudes de vie à maintenir pour les éviter autant que possible. Tout cela ne m’a pas empêchée de souffrir moi-même de dépression dans la période entourant la naissance de mon fils, il y a de cela deux ans.

Parce que je crois qu’il est important de parler de ces choses afin de briser les tabous et d’outiller les proches, j’aimerais vous partager mon histoire. Elle m’est propre, mais en même temps, je sais qu’elle ressemble à celle de beaucoup d’autres femmes.

 

On se croit à l’abri de la maladie, on la voit d’un œil extérieur, analytique. Et puis un jour, ça nous arrive.

Ma dépression périnatale

La dépression peut prendre plusieurs formes. Dans mon cas, les premiers signes de dépression sont apparus assez tôt, dès le premier trimestre de ma grossesse. C’est une amie à moi qui est infirmière, qui m’a fait remarquer que je n’avais pas l’air comme à l’habitude.

Quand elle a utilisé le mot « dépression », je l’ai essuyé du revers de la main. Mais non, je suis psychiatre, je le saurais! Avec du recul, elle n’avait pas tort. Durant toute ma grossesse, j’avais perdu l’envie de faire des activités, de voir des gens, et pour une personne active et sociable comme moi, c’était très anormal. 

Après la naissance de mon fils, cette lassitude a atteint un autre niveau. Je n’avais carrément plus envie de retourner travailler. Dans un domaine comme le mien, où le travail occupe énormément de place tant dans l’horaire que dans l’identité, c’était perçu d’une drôle de manière. Mes collègues m’ont aussi parlé de dépression postpartum. Ils avaient aussi raison.

J’aimerais tout de même dire qu’une part de ma réaction était toutefois normale. La maladie, mais aussi ma nouvelle réalité de maman me forçait à prendre du recul, à évaluer mes priorités et mon « plan de match ».

Parlons-en du plan de match! Comme bien des mères de ma génération, j’avais tout prévu d’avance. J’avais lu tous les livres et les manuels, j’avais même suivi une psychothérapie pendant ma grossesse. J’avais décidé que j’aurais besoin des services de trois nounous pour des quarts de travail différents, que j’aurais une vie sociale aussi occupée qu’avant et que je serais de retour au travail rapidement.

J’étais prête! Mais la réalité, c’est qu’on n’est jamais vraiment prête… et au final quand mon fils s’est pointé le bout du nez, tout ce que je voulais, c’était d’être auprès de lui.

Et il y a une partie de ça qui est normal! Mais il y a aussi le reste, ce dont il faut se méfier :

De mon côté, j’ai réalisé que j’avais vraiment besoin d’aide quand est venue la période de l’entraînement au sommeil. Pour être bien honnête, je n’aurais pas pu y arriver sans aide pharmacologique. Eh oui, même moi j’ai eu besoin de médicaments pour m’aider è surmonter cette épreuve.

Je pratiquais le co-dodo et ça me stressait beaucoup, et puis quand mon fils se mettait à pleurer, ça venait me chercher de façon viscérale, excessive même. J’étais incapable de le laisser pleurer. J’étais fatiguée, épuisée. Au final, ça nous aura pris un mois pour surmonter cette épreuve. Pendant un mois, personne dans notre petite famille n’a dormi! Mais on y est finalement arrivés.

Je dirais donc que c’est environ neuf mois après l’accouchement que mes symptômes dépressifs se sont empirés, en raison probablement de tous les nouveaux stress qui sont arrivés durant cette période : la pression du travail pour savoir quand j’allais revenir, la pression pour trouver une garderie, le changement de routine pour le sommeil. C’est vraiment là que j’ai atteint ma limite.

Il est normal que les émotions soient plus intenses à ce moment-là de nos vies. Je crois aussi qu’une certaine émotivité peut être un atout dans plusieurs aspects de nos vies, mais attention, quand nos émotions sont tellement intenses qu’elles nous empêchent de fonctionner, là il y a un problème.

Heureusement, je suis allée consulter et j’ai pu obtenir l’aide dont j’avais besoin.